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Infestus – « Ex|Ist » (2011)

Parution :Format :Label :Univers :Pays :
mai 2011LPDebemur Morti ProductionsDepressive Black MetalAllemagne

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Track-list :

  1. Akoasma
  2. Down Spiral Depersonification
  3. Darkness Blazing in the Flame of Fire
  4. Torn Observer
  5. Mirror Mind Reality
  6. Der Blick hinaus
  7. Descend Direction Void

Line-up : Andras : Vocaux, tous les instruments, mixage.
Membres additionnels : aucun.


J’ai découvert cet album via l’excellente interview de Metallian, dans le numéro 65. La session photos en disait très long, les commentaires un peu plus… Il me fallait me procurer cet album sans rien en écouter avant de le recevoir. Je tenais à ce rituel.

L’album en main, j’avais l’impression de porter une urne, celle contenant les cendres d’âme d’Andras, le compositeur, parolier, chanteur et musicien multi-instrumentaliste de ce très personnel album qu’est « Ex|Ist ».

En effet, cet opus entièrement créé par Andras est une sorte de journal intime, un témoignage de sa descente aux enfers, aux confins de lui-même, au plus profond de son être, là où tout n’est que désordre, laideur, chaos et douleur.

Un boîtier cristal traditionnel renferme un livret contenant les paroles, deux photos qui sont mélangées à l’artwork très simpliste, entre noir et gris, filaments, fêlures, rayures… L’image du CD reprend l’artwork sans rien de plus que le logo du label. Sur le back du boîtier, en intérieur, le copyright, les liens utiles, le concept de l’album. En extérieur, la track-list. Ni plus ni moins. On sait à quoi s’attendre en insérant le disque dans le lecteur.

Ici la fioriture n’est pas la bienvenue. L’essentiel est la note directrice. Comme un trompe-l’œil, Akoasma nous porte sur un filet de genre ambiant, qui m’a rappelé parfois Dagaard dans ses sonorités douces. Mais le titre va en évoluant, avec une parfaite maîtrise guitare/batterie, duo toujours enchanteur, exprimant les prémices d’une violence qu’on ne contient plus. Les premières images vocales, le premier cri, la première douloureuse mélodie. Introduction parfaite à l’introspection de l’auteur, n’ayant comme matériel de plongée que sa musique.

C’est d’ailleurs dans Down Spiral Depersonification qu’on sent l’apnée devenir suffocante. L’oxygène du bien-être manque à Andras comme à nous. Le vortex est ouvert, la descente n’a de cesse de durer tout au long du titre. La souffrance est intenable : souvenirs torturants, pesanteur de la réalité, marais émotionnels…

« Escaping from pain screaming memories
Where no remedies ever helped me out
I am falling deeper into what truly is
The oppressed sides of myself screaming out loud
 »

Avec Darkness Blazing In The Flame Of Fire on atteint un sommet, celui du passé. Très simplement conté, ce titre est une porte ouverte sur les ombres que sont sa disgrâce, torturent son âme, le tiennent éloigné de tous dans une aura noire de solitude.

« Shadows reveal :
I am your disgrace, torturing your soul
Keeping you away from everyone

And I am what you feel while willing to end their lives
Leaving you alone with all your rage

We are everything that you try to escape
Ruining your life and all that is left

We are – the darkness, blazing in the flame of fire
 »

Andras

Derrière ce titre, il y a un vide dans la track-list, qui doit certainement représenter la fracture étrange entre le passé et le présent. Car cet album en est le fruit : « Ex|Ist » veut dire Ex (pour « passé » en latin) et Ist (pour « présent » en allemand), les deux reliés par une barre transversale représentant le lien entre le passé et le présent. Et lorsqu’on le lit ainsi, cela donne « Exist » en anglais, soit l’existence.

Ce chapitre premier est un passé douloureux, la suite est un présent de conciliation où la fin n’est pas la mort à proprement parler mais la soumission aux ombres. Le second chapitre termine sur un futur à supporter plus qu’à vivre, mais j’aimerai dire : tant qu’il y a de la vie il y a de l’espoir !

Ainsi Torn Observer est en quelque sorte une seconde introduction à ce chapitre nouveau :

« I dreamed of breathing out my life forever into the endless blackened night sky… »

Ce titre, suivi d’un excellent Miror Mind Reality, ma chanson préférée, ô combien adaptable à tout mélancolique amoureux des ténèbres, fait un lien parfait avec l’irrésistible envie d’y rester, que tout cesse, que le miroir se brise, puisque rien ne sait soigner ces plaies de l’âme, qu’aucun remède ne peut venir à bout de cet état schizophrénique. J’oserai dire que ces paroles là sont dangereuses. Andras nous mettra d’ailleurs en garde dans l’interview réalisée par Metallian (numéro 65) : « Alors attention quand vous l’écouterez… » Car cet album « peut ouvrir des portes qui ne se refermeront jamais ! ».

« Hold still ! We mean you no harm !
We will take what is rightfully ours !
Behold us ! The manifold contagious swarm !
We will assume control of all your powers !

The black foe that infiltrates my innermost
Swarm-like infesting even the smallest of my hideouts
Forced to inhale this poisonous mixture of my darkest parasites
Violently spreading – like storm clouds they carry destruction within
 »

« Subject to this life force obscure
Losing myself in countless faces
Mirror Mind Reality – there is no fucking cure
Hearing Insanity’s call from my darkest place
 »

Der Blick Hinaus est en allemand, ce qui est fort appréciable car plus personnel encore… Ce titre est cruel, c’est l’acceptation derrière la douleur. Alors Descend Direction Void clôt l’album. La folie est là, inévitablement, l’état de solitude est extrême. La chair demeure, le cœur pulse, les paupières s’ouvrent sur de nouveaux matins, mais à l’intérieur, immanquablement, le vide, l’absence d’empathie, le lac de l’esprit sans onde à la surface. L’être est calme car soumis désormais aux ombres qui vivent dans le feu noir, celui qui brûle la moindre sensation.

« Finally controlling every piece of mind and flesh
They drive me into utter nothingness
Into the dungeons they used to call their home
which now will be my final doom
 »

« I rather die than to feel this pain
All my efforts – everything in vain
My emotions turn to grey
I will forever fade away
… fade away
 »

Je n’ai pu parler de musique en même temps car chaque titre reprend la même ambiance. Si la mélodie est différente, d’un premier abord on a du mal à distinguer si on a déjà entendu ou non telle ou telle chanson, hormis pour Akoasma et Mirror Mind Reality. La musique est tout simplement « tripante » dans son ensemble, elle est comme un fil conducteur depuis l’ouverture du vortex jusqu’à la nuque d’Andras sur laquelle souffle la mort. La guitare est un flux mélodique qui nous rattache depuis le bord du vortex, pour ne pas sombrer complètement avec Andras. Les aigues prédominent comme pour figurer les cris, les hurlements, tandis que la batterie imite les battements de cœur, désordonnés, lourds, un rapide rythme de suffocation… Les temps morts sont grandement appréciables. Ils laissent cette sensation d’abandon, de flottement dans la chute. Lorsque la mélodie reprend, le plus souvent brutalement, l’aspiration est terrible. Violente et terrible. Les claviers aident grandement à mettre en place l’ambiance dépressive. Même s’ils sont beaucoup plus simplistes dans leurs notes que les deux précédents instruments, leurs nappes musicales sont posées là où elles font effet. C’est ainsi que je peux dire sans la moindre hésitation qu’Andras est un merveilleux musicien tout autant qu’un très bon chanteur.

« Ex||Ist » m’a prit plus d’un an d’écoute, de réflexion, de ressenti. Impossible d’en écrire quoi que ce soit avant : c’est un album qui se ressent, dangereusement, un trésor musical à posséder sur son étagère et une œuvre intime à respecter.

Album entier à écouter sur YouTube.

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